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Monastère bénédictin de Tioumliline:1927-1956

Monastère bénédictin de Tioumliline:

 Maintenant disparu, le monastère bénédictin de Tioumliline (1952-1968), du nom de la source qui alimentait Azrou, fut un haut lieu de la rencontre et de la recherche.

 Il dispensait des cours internationaux d’été. Cette première communauté de religieux établie au Maroc, situé à 5 kilomètres d'Azrou, au beau milieu de la forêt de chênes verts, à 1.500 mètres d'altitude, disposait d'une bibliothèque importante ramenée de France.

 

C'est là que les élèves du collège venaient consulter les ouvrages et la presse mis à leur disposition. Des causeries et conférences sur les sujets les plus divers étaient organisées à leur intention.

 

Ils y assistaient également à des projections de films ou de documentaires. Cet espace de liberté très prisé des élèves du collège l'était beaucoup moins des autorités françaises qui n'appréciaient pas la fonction culturelle que prenait le lieu.

 

Les autorités de contrôle de l'Istiqlal exigeront, à leur tour, la fermeture du monastère, le considérant (à tort) comme foyer de prosélytisme chrétien. Ce monastère où le peintre Jilali Gharbaoui, a séjourné, finira par fermer ses portes.

 

Par Ibn Khaldoun

UN PEU D'HISTOIRE:

C'est le 26 octobre 1952 que Monseigneur Lefèvre, vicaire apostolique de Rabat, a béni le nouveau prieuré de moines bénédictins installé depuis peu au coeur du Moyen Atlas, à Tioumliline, du nom de la source qui alimentait Azrou. C'est la première communauté de religieux qui s'établit au Maroc pour y vivre la vie monastique faite de prière, de travail, de silence et d'austérité. Ce prieuré bénédictin se compose de quinze moines et de cinq frères convers venus de l'abbaye d'Encalcat, dans le tarn. Le prieuré de Tioumliline est situé à 5 kilomètres d'Azrou, dans une magnifique forêt de chênes verts. A 1.500 mètres d'altitude se dressent les bâtiments de l'abbaye qui dominent Azrou, qu'on aperçoit à travers une gorge profonde et boisée.

Le bâtiment central comprend, en étage, les cellules des moines; au rez-de-chaussée, les cuisines et le réfectoire. Un autre bâtiment est réservé au dortoir, à un pensionnat d'enfants et à la bibliothèque. Enfin un toisième bâtiment est la chapelle.

 

Extraits de Le collège d'Azrou et la formation d'une élite berbère civile et militaire au Maroc : 1927-1956 .

Indépendamment de la vie monastique, les moines de Tioumliline se consacrent à une institution d'enseignement secondaire pour une trentaine d'enfants qui vivent au milieu d'eux. En outre, il y a un home pour accueillir les hôtes, tradition en grand honneur chez les bénédictins, depuis saint Benoît. Mais il faut dire que la plupart sont des prêtres séculiers et des laïcs à la recherche de tranquillité ou avides de goûter les joies profondes de la vie monastique. Ils disposent d'une bibliothèque importante ramenée de France.

C'est dans ce havre de paix et de verdure que régulièrement se rendent les élèves du collège pour consulter les ouvrages et la presse mis gracieusement à leur disposition par les bénédictins de Tioumliline. Des causeries et conférences sur les sujets les plus divers sont organisées à leur intention, ce qui leur permettait de se familiariser avec les techniques du débat. Outre la lecture et la consultation de manuels et ouvrages généraux, ils assistent à des projections de films ou de documentaires dont ils gardent encore une trace dans leur mémoire. C'est ainsi que les jeunes collégiens d'Azrou découvrent dans ce magnifique théâtre de verdure et de fraîcheur un cadre idéal pour forger leur caractère, enrichir davantage leur bagage culturel, et laisser libre cours à leur pensée sans aucune contrainte. C'est en quelque sorte la revanche qu'ils ont eue, disent-ils, d'une manière indirecte en ayant une université à quelques kilomètres d'Azrou :

 

    "Si on avait suivi la tendance du collège, ajoute un ancien élève aujourd'hui haut cadre de l'Etat, on aurait eu une université beaucoup plus tôt, mais voilà ç'aurait été quelque chose qui aurait échappé au pouvoir jacobiniste. Je le dis d'autant plus que ce jacobinisme a eu comme effet de casser un contexte culturel et beaucoup plus un contexte universitaire, dont Tioumliline était une certaine promesse". (Entretien, 1999, M.B.)

 

Le prétexte mis en avant par les acteurs politiques de l'istiqlal pour étouffer dans l'oeuf cet espace de culture et de liberté, c'est la prétendue tendance du monastère à chercher à convertir au christianisme les élèves du collège. Au cours des entretiens, les anciens élèves ne se contentent jamais de réponses brèves lorsqu'ils sont questionnés sur ce sujet. Tous les témoignages concordent pour reconnaître que beaucoup d'élèves faisaient leur prière, la plupart du temps, dans les dortoirs :

 

    "On n'avait jamais eu l'idée d'embrasser une autre religion, autre que la religion musulmane. Il y avait bien ici des pères, des moines qui avaient gardé des élèves chez eux, mais c'était un centre de formation, comme à Tioumliline. Ceux de ma promotion, des médecins actuellement, Bertal, Maâouni (professeurs de médecine) etc ils faisaient tous leur prière à l'heure. Tout cet entourage, les professeurs étaient bien, ils n'intervenaient jamais pour nous faire embrasser telle ou telle religion, tout ça n'avait aucune influence sur la religion." (Entretien, 1999, M.C.)

 

En réalité, cet espace de liberté très prisé des élèves du collège l'était déjà beaucoup moins du côté des autorités de contrôle qui n'appréciaient la fonction culturelle que prenait le foyer-monastère de Tioumliline. Les autorités de contrôle de l'Istiqlal prennent aussitôt le relais de leurs collègues français pour exiger la fermeture du monastère, foyer de prosélytisme chrétien affirment-ils sans apporter la moindre preuve pour étayer leurs allégations. Les nouvelles instances gouvernementales en place à l'indépendance, désireuses d'étendre leur contrôle sur la région - région qui a toujours échappé aux tentatives répétées de mainmise du parti de l'istiqlal -, ces instances ont donc décidé de manière arbitraire, au nom du cheval de bataille fallacieux de l'arabisation, de réduire à l'anéantissement le monastère, privant ainsi les élèves du collège d'Azrou de leur unique ouverture sur le monde extérieur.

 

 



29/07/2013
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